Le transport fait-il partie du voyage ?Pour une compréhension du déplacement touristiqueà partir de l’antagonisme contrainte/agrément.
Contrairement aux chercheurs qui les ont précédés, les géographes des transports contemporains
ont accordé une place congrue au fait touristique, alors même que les flux engendrés par cette activité
sont omniprésents, voire structurels, pour certains modes, certaines régions ou certaines périodes de
l’année. Cette attitude reflète en cela l’organisation même d’un secteur où prévalent les approches
techniques et socio-économiques reléguant les pratiques et les motivations individuelles au second
plan (Brocard et al. 2005), (Bavoux & al., 2005). Pour les géographes du tourisme, le transport est en
revanche depuis toujours perçu et analysé comme un élément permissif de la structuration de
l’espace touristique (Cazes, 1985 ; Gay, 1993) et largement extérieur à ce qui fait le cœur de
l’expérience touristique. Aujourd’hui cependant, les réflexions tendent à souligner l’imbrication
croissante du fait touristique et de l’expérience commune de la construction des territoires (Viard,
2000) et de la perception des espaces géographiques, les formes d’habiter (Stock, 2005). Dans les
deux cas toutefois, au sein de la mobilité touristique on peut distinguer schématiquement deux
moments opposés, mais néanmoins complémentaires, qui sous-tendent l’analyse, soit pour l’appuyer
soit pour en contester la stricte opposition, à savoir :
- une mobilité d’agrément, de découverte, enrichie par une expérience intérieure, qualitative et fruit
d’un choix personnel, le voyage qui participerait pleinement de la pratique touristique ;
- une mobilité utilitaire, souvent collective qui est à la fois subie et contrainte, le transport, c’est-à-
dire l’acheminement qui rend effectif l’accès aux sites et aux expériences proprement touristiques.
Le rapprochement dialectique des deux termes est en fait riche de potentiels que l’article cherche à
explorer et à systématiser. Il passe par un travail d’articulation explicite entre les deux dimensions de
la mobilité touristique et s’interroge sur les relations qu’entretiennent les deux versants du
déplacement touristique. Il en résulte la possibilité de combinaisons qui conduisent à interroger les
modalités de construction de spatialités touristiques en situation de mobilité (Stock, 2005)
Antoine BEYER - SPLOTT – IFSTTAR, Université - Paris-Est
Géotransports 2016, Transport et tourisme : rapports mobilités – territoires n° 7